Entre blocages et embouteillages, la circulation à Port-au-Prince n’est pas une chose facile

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La circulation à Port-au-Prince est un défi quotidien, amplifié par une crise sécuritaire sans précédent. Entre les blocages causés par les marchés improvisés, les embouteillages monstres et l’absence de solutions concrètes de la part de l’État, les habitants peinent à vivre et à se déplacer dans une ville étouffée par le chaos. Une radiographie d’une capitale en crise.

Circuler dans Port-au-Prince, capitale d’Haïti, relève d’un véritable parcours du combattant. Déjà difficile en temps normal, la situation est devenue quasiment insoutenable en raison de la montée en puissance des groupes armés qui étendent leur contrôle sur une grande partie de la ville.

La violence gangrène la capitale, poussant les habitants à fuir les zones les plus dangereuses. Les marchés traditionnels et les petites entreprises sont désertés au profit des espaces encore partiellement sécurisés. Faute d’infrastructures adaptées dans ces zones refuges, les rues se transforment en marchés à ciel ouvert, où piétons et vendeurs occupent trottoirs et chaussées. Cette occupation anarchique réduit les voies de circulation, obligeant les piétons à marcher au milieu des routes, exacerbant ainsi des embouteillages déjà légendaires.


Cette dynamique est encore plus flagrante dans les rares quartiers où subsiste un semblant d’activité commerciale. Les trottoirs sont envahis par des marchandes, des garages et même des car-wash improvisés. Ces pratiques, autrefois marginales, ont explosé avec la crise actuelle. Les déplacés internes, chassés de leurs anciens lieux d’activité, n’ont d’autre choix que d’occuper les espaces disponibles pour survivre.


Ainsi, des routes conçues pour une circulation à deux voies – une pour chaque sens – sont désormais incapables de répondre à l’afflux massif de véhicules, de piétons et d’activités. Les embouteillages interminables étouffent la ville, obligeant les Port-au-Princiens à passer des heures sur des trajets qui ne devraient durer que quelques minutes. Cette situation pèse lourdement sur leur quotidien, compliquant l’accès au travail et à leurs activités essentielles.


Selon l’ONU, plus de 80 % de la capitale sont sous le contrôle des gangs depuis 2023. Les 20 % restants – où l’État a encore une présence limitée – concentrent désormais une population et des activités qui dépassent largement leur capacité d’accueil. Ce déséquilibre provoque une saturation inédite des infrastructures, transformant Port-au-Prince en un véritable goulot d’étranglement.


Dans ce tableau déjà sombre, l’État brille par son absence. Celui qui devrait garantir la sécurité et le bon fonctionnement de la capitale semble avoir lui-même reculé face à la violence. Plusieurs institutions publiques majeures ont dû abandonner leurs locaux pour s’installer dans des zones plus sécurisées. Le Parlement haïtien, le Palais de justice et l’Hôpital général figurent parmi les exemples les plus frappants de cet exode étatique.

Ce vide de pouvoir a laissé le champ libre aux gangs, qui imposent leur loi sur une grande partie de la capitale. En abandonnant des zones entières à leur sort, l’État a non seulement aggravé la crise humanitaire mais a aussi plongé les rares espaces fonctionnels dans un chaos incontrôlable.


Port-au-Prince, autrefois considérée comme le cœur battant d’Haïti, s’asphyxie sous le poids de ses propres contradictions. La violence des gangs, combinée à l’inaction de l’État, a transformé la ville en un champ de bataille où la survie prime sur le quotidien. Pourtant, une lueur d’espoir subsiste : la possibilité d’un sursaut de l’État pour reconquérir les zones abandonnées et redonner à la capitale un semblant d’ordre et de dignité. Car sans action rapide et concrète, les embouteillages ne seront que le reflet visible d’un malaise bien plus profond, celui d’un pays au bord de l’effondrement.


Par Ricky JOSEPH

Étudiant à l'UEH

rickyjoseph1998@gmail.com

+ 509 4778 0585



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