Le slogan des bandits armés après chaque attaque : « Nou bay li jan blan an mande l la. »

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À chaque attaque perpétrée par les bandes armées, elles répètent ce slogan : « Nou bay li jan blan an mande l la. » [On l'a fait comme le blanc le voulait]. Que veulent-ils insigner ? Qui est « le blanc » ?


Aujourd'hui, Haïti est qualifié de pays « ganglé », [rempli de gangs] pour citer l'expression d'un autre. Une affirmation qui n’est pas totalement vraie. Elle découle de la conception du macro-céphalisme urbain du pays, où Port-au-Prince représente l'ensemble de ses organes vitaux.


Selon les rapports, 80 % du territoire de la capitale est sous le contrôle des bandes armées. Ces dernières occupent des zones stratégiques et encerclent la capitale. Leur mode opératoire soulève de nombreuses questions : pour qui travaillent-elles ? Qui les provisionne en équipements ? Pourquoi ces zones sont-elles particulièrement ciblées ?


Concernant les équipements, un rapport de l'ONU révèle qu'ils proviennent directement des États-Unis ou transitent par la République dominicaine. Quant à leurs sources de financement, elles incluent des hommes d'affaires, des politiciens ainsi que des activités illicites (kidnappings, rançonnages, etc.).


Leur mode opératoire, pour de nombreux spécialistes de la sécurité, suscite des interrogations. Comment ces jeunes, qui ne pouvaient même pas se nourrir, ont-ils développé des techniques militaires aussi sophistiquées ? Avant 2018, les gangs, ou du moins ceux qui existaient, se trouvaient dans des zones reculées, loin du regard du grand public, comme Grand Ravine, Ti-bwa, Cité Soleil... Arnel JOSEPH est l'un des premiers chefs de gang à s'installer près d'une route nationale (la route nationale #1, à quelques kilomètres du Palais National). Depuis lors, du nord au sud, d'est en ouest, respectivement de « Mòn Kabrit » à Gressier en passant par Martissant, de Thomassin à Minoterie, la capitale et le département de l'Ouest sont encerclés. Les déplacements relativement sécuritaires se font par voie aérienne. Il est pratiquement impossible de quitter le département de l'Ouest, où se trouve la capitale, par voie terrestre sans être rançonné par des bandes armées. Le département de l'Artibonite est le deuxième plus touché par l'insécurité après l'Ouest. Cette région est le grenier de la production rizicole du pays, un riz de très bonne qualité, compétitif face aux produits importés, qu'ils proviennent des États-Unis ou d'autres pays.


En criminologie, face à tout crime, la première question que l'on se pose est : à qui profite le crime ? La réponse à cette question est complexe. Cependant, on pourrait dire que ce sont les gangs et leurs proches, les vendeurs d'armes et autres équipements létaux, les lignes aériennes internes, les responsables de bateaux, les politiciens, ou encore les compagnies de sécurité (souvent propriété de hauts gradés de la Police Nationale). Certains de ces profiteurs sont-ils à la base de nos maux, ou ont-ils simplement eu de la chance, se rétrouvant au bon endroit au bon moment ? Ou bien travailler-ils uniquement pour maximiser leurs profits au détriment de nos souffrances ? Ou encore, travaillent-ils pour une entité qu'ils ne connaissent même pas ou dont ils ignorent les véritables objectifs ?


Un ensemble de discours et de théories tente d'expliquer la misère du pays. Parmi celles qui gagnent du terrain, il y a la théorie du complot international, particulièrement en ce qui concerne l'Occident. Cette théorie avance plusieurs points : une volonté d'éradiquer ce peuple noir dans le continent et / ou dans l'île ; faire payer à ce peuple l'insolence d'avoir restructuré le monde esclave-maître, noir-blanc, qui avait été construit ; empêcher le développement du pays, car si Haïti venait à se développer, d'autres pays pourraient croire que tout est permis dans ce monde dirigé par l'Occident ; maintenir Haïti dans la misère pour s'emparer de ses ressources naturelles.


On ne peut pas affirmer ces théories, mais on peut se demander : pourquoi Haïti, un pays si proche des États-Unis, croupit-il dans une telle misère ? Pourquoi les États-Unis laissent-ils entrer les armes dans le pays, alors qu'Haïti subit un embargo sur les armes de leur part ? Pourquoi tant d'ingérence dans nos élections ?


À chaque attaque perpétrée par les bandes armées, elles répètent ce slogan : « Nou bay li jan blan an mande l la. » [On l'a fait comme le blanc le voulait]. Que veulent-ils signifiant ? Qui est « le blanc » ?


En réalité, « le blanc » est peut-être moins une personne qu'une idée, une symbolique de domination et d'influence étrangère. Mais ce qui reste troublant, c'est que, chaque fois que ce slogan est prononcé, il éveille en nous une question inquiétante : sommes-nous réellement maîtres de notre propre destin, ou ne faisons-nous que suivre, sans le savoir, un plan plus vaste, conçu ailleurs ? Car, si nous continuons à croire que « le blanc » dicte notre sort, alors nous sommes déjà prisonniers d'une fatalité qui dépasse nos propres choix.



Par AUGUSTE Jimeson

✓ Licencié en sciences de l'éducation
✓ Étudiant finissant au Centre de Formation pour l'École Fondamentale (CFEF) de Port-au-Prince
✓ Professeur d'ETAP depuis 3 ans

✓ Étudiant finissant d'études en Administration publique à l'INAGHEI


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