Entre politicien, homme d'affaire, policier, journaliste et population qui est en connivence avec les Bandits ?

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La réponse à cette question, pour beaucoup, est simple : les deux premiers ne sont pas innocents. C'est ce qu'affirment le rapport de l'ONU, la liste des familles qui vendent des armes et munitions aux groupes armés du ministère de l'Intérieur, ainsi que la CNDDR.


Cette question nous interpelle après que des policiers ont interdit l'accès à des journalistes à la salle diplomatique de l'aéroport international Toussaint Louverture, ce samedi 6 juillet 2024, lors du retour du Premier ministre, S.E.M. Garry Conille, sous prétexte qu'ils sont de connivence avec les gangs.


Si l'on tente de retracer l'histoire des gangs en Haïti, de leur forme en tant que force non étatique et illégale, exerçant un pouvoir incontrôlé qui opprime la population, on les associera au leader charismatique, l'ex-président de la République, M. Jean-Bertrand Aristide, durant son second mandat, plus précisément au mouvement Lavalas. Leur mission était d'agir comme une force auxiliaire pour protéger le mandat du président Aristide contre les élites, les troupes d'anciens militaires antigouvernementales (FRAPH), et l'international, face à la menace d'un coup d'État. Cependant, les gangs, appelés à l'époque les "chimères", n'ont pas pu éviter une telle action. Depuis lors, ils sont devenus un élément crucial dans l'histoire et la vie quotidienne du pays.


Durant le second mandat du président René G. Préval, deux choix ont été proposés aux bandits : la mort ou la prison. Durant cette période, un minimum de sécurité régnait. Cependant, le célèbre chanteur international haïtien Sweet Micky prévoyait et promouvait la légalisation du banditisme dans une chanson intitulée : "Bandi legal yo pran lari a." [Les bandits légaux ont envahi les rues]. Était-ce une prédiction sincère ? Après le mandat du président Préval, c'est le chanteur qui passera du statut de président du compas à celui de président de la République, S.E.M. Michel Joseph Martelly. Durant son mandat, les bandits n'ont pas posé de problème à un niveau macro. Après son mandat, sa prédiction se réalisera. À partir de 2019, de grands mouvements de protestation vont surgir contre le président de l'époque, S.E.M. Jovenel Moïse, poulain de l'ex-président Martelly. Durant ce mouvement, appelé "Pays Lock", des barricades furent érigées partout, contrôlées par des hommes armés d'armes blanches. Ces derniers vont gagner en influence grâce au financement d'hommes d'affaires et de politiciens, passant ainsi d'armes blanches à des armes à feu. Dès que la police réprimait certains d'entre eux, les politiciens et quelques médias antigouvernementaux dénonçaient des arrestations politiques. Ce fut le cas pour Vitel'homme Innocent. Après son arrestation, des journalistes et politiciens demandèrent sa libération, affirmant qu'il était un entrepreneur et un acteur social. Aujourd'hui, il est l'un des chefs de gang les plus puissants du département de l'Ouest ; même des citoyens américains ont été victimes de ses actions, et une prime de 2 millions de dollars a été mise sur sa tête par le Département d'État des États-Unis d'Amérique. Ainsi, pour le contrôle des territoires et des barricades, des groupes armés vont émerger


Aujourd'hui, les groupes armés contrôlent 80 % de la capitale, selon la cheffe du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH). On dénombre environ 300 groupes de gangs. Pour survivre, ils rançonnent les voitures, les marchandes dans les marchés qu'ils contrôlent, imposent des taxes pour l'eau, l'électricité, les mines de sable, les maisons abandonnées. La majeure partie de leurs revenus provient du kidnapping, sans compter ce que l'État leur verse pour obtenir le droit de passage sur certaines routes, pour le fonctionnement de certaines institutions, ou pour des équipements saisis.


Les journalistes, qu'ils soient nationaux ou internationaux, couvrent leurs conférences, diffusent leurs musiques, demandent des interviews, les supplient pour obtenir des faveurs concernant des personnes kidnappées ou pour un droit de passage.


Les hommes d'affaires, cherchant à maximiser leurs profits, leur vendent des armes, des munitions et tout autre équipement dont ils ont besoin. Ceux qui n'entretiennent pas de tels rapports avec eux les paient pour assurer la sécurité de leur entreprise ou le passage de leurs cargaisons. Certains les financent en tant qu'agents sociaux. Selon un rapport de l'ONU, plusieurs hommes d'affaires et politiciens financent les gangs.


Les policiers, quant à eux, sont de connivence avec certains groupes, soit pour l'argent, soit pour leur propre sécurité.

La population ne cherche que la sécurité, et pour cela, elle est prête à payer. Par exemple, le coût du transport entre Carrefour et le centre-ville devrait être de 50 gourdes, comme pour Pétion-Ville. Cependant, avec trois postes de rançonnement (Portail Léogâne, qui est maintenant à la 1ère Avenue Bolosse; Martissant, et Fontamara), le tarif est monté à 100 gourdes, soit une augmentation de 100 %. Pour elle, cela n'est rien tant que la route est sécurisée. Toutefois, ces frais ne font qu'enrichir les gangs. Le même constat s'applique au kidnapping.


Les barricades sont de retour dans les quartiers, non pas pour rançonner ou violer la population, mais pour la protéger. Elles sont gardées par une brigade formée d'hommes du quartier, certains lourdement armés. Ne répétons-nous pas les erreurs du passé ? Ne risque-t-on pas de passer des brigades de quartier aux gangs de quartier ? Lorsque la sécurité sera rétablie, que fera-t-on de ces brigades, de leurs membres ou de leur logistique ?


En somme, pour revenir à notre question : entre les politiciens, les hommes d'affaires, les policiers, les journalistes, et la population, qui est en connivence avec les bandits ? Nous le sommes tous, que ce soit de manière directe ou indirecte. Cette sucrerie que vous consommez a franchi un poste de rançonnement. Vous avez payé ce coût au chauffeur. Vous avez contribué à la collecte pour la libération d'un proche. De la même manière que chacun contribue au Trésor public, que ce soit par les taxes ou les impôts, nous participons au trésor des gangs. Qui est en connivence ? Nous le sommes tous. Sommes-nous complices au même niveau ? Avions-nous d'autres choix ? Chaque partie aura ses raisons. Cependant, les faits sont là : nous sommes tous en connivence et nous sommes tous victimes.


Sources 

https://www.nospetitsfreresetsoeurs.org/les-violences-des-gangs-en-haiti-quelles-solutions/#:~:text=Les%20gangs%20en%20Ha%C3%AFti%20%3A%20Contexte,Duvalier%20pour%20r%C3%A9primer%20les%20oppos



Jimeson AUGUSTE

augustejimeson08@gmail.com

Licencié en sciences de l'éducation

Étudiant finissant au CFEF/spécialisation Math-Physique/MENFP

Étudiant en Administration publique à l'INAGHEI/UEH

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