Politique: Lorsque la communication politique est au rabais, l’espace politique règle tout

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 Jackson MÉRINOR,  Rédacteur en chef

A

vec un internet toujours plus omniprésent et indispensable au quotidien et la fulgurante progression de la numérisation de notre monde, la croissance de la société de la communication s’accélère. Ces évolutions touchent le champ politique et les acteurs subissent ses effets ou cherchent à en faire subir d’autres au profit des rapports de force qu’ils souhaitent établir.

    L’extension de la politisation de l’espace public avec la démocratisation qui ne cesse de s’étendre, finit par absorber la société civile dont le rôle est désormais diminué. Inséparable de la communication, l’espace politique devient le centre grandissant qui englobe l’espace public et la société civile au point de créer une zone intermédiaire entre celle-ci et l’Etat.


    L’espace public, espace symbolique où se tiennent et s’agitent les discours pour la plupart contradictoires, tenus par les différents acteurs politiques, intellectuels, culturels, religieux, sociaux aboutit à une certaine confusion avec l’espace politique, ce qui établit automatiquement la fin de la frontière entre la vie publique et la vie privée. On peut remarquer que certains thèmes comme le chômage, l’éducation, l’emploi, la sécurité, l’immigration ont tendance à perdre leur place dans la sphère publique. Autrement dit, entre les interfaces public/privé ; société civile/espace public ; espace public/espace politique, la politisation est constante. Etant donné qu’il devient difficile de distinguer le rôle et les enjeux de ces interfaces, la communication politique ne parvient plus à maintenir leur autonomie étant au cœur de notre soi-disant système démocratique fragilisé dont l’acquis est récent.

    En effet, l’égalité politique par le suffrage universel aboutit à des inégalités, une certaine hiérarchie entre l’électeur et l’élu et met fin à la responsabilité sociale du second, médiocre et incapable après le vote dans un environnement sociopolitique marqué par sa faillite et dont l’arrogance intraitable, trop visible aujourd’hui grâce aux micros des journalistes parvient à tuer l’espace public comme étant le lieu de débats contradictoires.


    Par ailleurs, bénéficiant d’une médiatisation sans limite et d’une représentativité omniprésente, l’acteur politique devient légitime devant l’espace public médiatisé, puisque la logique de ce processus de publicisation démocratique c’est de le rendre visible, connu et important. Les m
édias, en sacralisant son discours, semblent par-là provoquer un certain déséquilibre en n’établissant aucun critère au nom duquel il faut donner la parole (le micro), puisque la communication requiert elle-même une logique de représentativité. Les médias ou les journalistes devraient être en mesure de l’évaluer en finissant un peu avec la représentativité assurée par l’élection en vue d’atténuer l’émergence de la « politique sauvage » avec pour complément le populisme, contestant la politique institutionnelle et dont le risque constant met en cause l’efficacité de la communication politique.

    L’individu, le citoyen, perdu dans la taille et le nombre de ses soucis et de ses problèmes, se trouvant placé au centre du système politique, quoique souverain et libre, n’a aucune capacité d’action sur les grandes décisions. Il devient en réalité seul et sans pouvoir, il ne s’identifie plus aux discours des décideurs et n’arrive pas à comprendre les ressorts de leurs comportements à travers l’action publique. Vu que l’acteur politique conçoive son action  et ses préférences politiques  à travers une logique de bénéfices, il agit en fonction d’un intérêt particulier clairement identifié débouchant sur une stratégie parfaitement incohérente à ses obligations. Et, loin d’affirmer ses objectifs fixés, une fois pour toutes, il n’hésitera pas à modifier ses buts en fonction de ses privilèges, à jouer avec le temps, lui permettant d’avancer ses intérêts.  Et ici, pour y remédier , ces attitudes devront conduire en définitive à une modification des codes de l’action politique où les citoyens devront se transformer en acteurs, tenus désormais de maitriser un double langage : d’un côté, celui de l’affrontement idéologique qui établit une opposition radicale avec les manœuvres politiciennes et de l’autre, il faut qu’ils soient en mesure de s’exprimer dans le langage des politiques publiques, mettant l’accent sur les limites des choix politiques et l’ampleur des contraintes.

    Il est donc urgent de repenser la communication politique en identifiant les menaces qui planent sur le système démocratique que nous n’arrivons pas encore à instaurer véritablement  dans le cadre d’une guerre de l’information désormais ouverte.


                                                                    

Jackson MERINOR,

Rédacteur en Chef/LCI

Etudiant en Affaires Internationales & Etudes Stratégiques

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